C’est au détour d’une cour pavée du 8ème arrondissement que j’ai découvert le sanctuaire estival le plus confidentiel de la capitale. Niché au coeur de la Maison Delano, ancien hôtel particulier du XVIIIème siècle, Le Patio Brugal offre une parenthèse caribéenne à quelques pas du Palais de l’Élysée. Un mariage audacieux entre le savoir-faire séculaire d’une maison de rhum dominicaine et l’élégance du luxe parisien qui transforme cet espace de 200m² en une véritable oasis urbaine où le temps semble suspendu.
L’esprit du lieu

Dès mon arrivée, je suis saisie par l’atmosphère qui règne en ces lieux. La métamorphose opérée depuis le 27 mars est saisissante : des tonalités bleutées baignent l’espace d’une lumière diaphane, dialoguant avec des touches dorées qui rappellent subtilement les reflets ambrés du rhum Brugal 1888. Le mobilier, aux lignes épurées, invite à l’abandon tandis que le bar signature trône au centre de la cour, véritable manifeste esthétique où laiton brossé et cannage traditionnel revisitent les codes du « Quiet Luxury » cher à la Maison Delano.
« Le luxe n’est pas dans l’ostentation mais dans l’authenticité des détails, » me confie Maria Cherakkal, Food & Beverage Manager, en m’accueillant dans cet espace qui peut être couvert, chauffé et même privatisé selon les saisons. Cette flexibilité fait du Patio un lieu de vie pérenne, qui promet de prolonger l’expérience jusqu’au début de l’automne.
Une carte qui célèbre l’art du rhum
Si le cadre est impressionnant, c’est bien dans les verres que s’exprime toute la poésie de cette collaboration. La carte des cocktails, exclusivement élaborée autour du Brugal 1888, réinterprète avec finesse les grands classiques de la mixologie. J’opte pour la « Sérénade », revisitation raffinée du Coco Fizz, où le rhum se marie délicatement à l’eau de coco et au jus de citron frais. Dès la première gorgée, la texture soyeuse caresse le palais avant que les notes de vanille et de caramel du rhum ne s’épanouissent, équilibrées par la fraîcheur acidulée du citron. La finale, légèrement boisée, rappelle les fûts de chêne dans lesquels ce nectar a patiemment mûri sous le soleil dominicain.

L’harmonie se poursuit avec l’assiette de Saint-Jacques aux agrumes qui accompagne cette création. Le cru et le cuit dialoguent avec élégance, les notes iodées du mollusque se mariant parfaitement aux accents de noix de coco du cocktail, tandis que les agrumes font écho à la fraîcheur citronnée. Un accord parfaitement orchestré qui témoigne d’une réflexion approfondie sur l’expérience gustative proposée.
Un héritage repensé
Derrière cette carte se cache une histoire familiale vieille de 135 ans. Fondée en 1888 par Don Andrés Brugal, cette maison dominicaine transmet son savoir-faire depuis cinq générations. La présence du Brugal 1888 n’a donc rien d’anodin dans ce lieu où tradition et modernité se rencontrent. Ce rhum emblématique, fruit d’une double maturation en fûts de bourbon puis de sherry, incarne parfaitement cette philosophie. Sa robe acajou profond évoque le bois précieux des boiseries de l’hôtel particulier, tandis que sa complexité aromatique, notes de chocolat, de fruits secs et d’épices douces, offre un terrain de jeu idéal aux mixologistes.
J’ai particulièrement apprécié la façon dont l’expérience Brugal imprègne l’ensemble de l’offre gastronomique. Les pâtisseries ne sont pas en reste avec un baba au rhum 1888 et fruits exotiques dont la brioche moelleuse, gorgée de sirop parfumé, libère en bouche des arômes de vanille et de fruits confits qui prolongent le plaisir. La tradition dominicaine du « cafecito » – quelques gouttes de rhum dans un café – trouve également sa place dans cette carte pensée comme un voyage sensoriel.
Au-delà du verre
Ce qui distingue véritablement Le Patio Brugal d’autres collaborations saisonnières, c’est cette volonté d’immerger le visiteur dans un univers cohérent. Les événements ponctuels prévus tout au long de l’été, DJ sets, dégustations privées et ateliers immersifs, promettent de faire vivre la convivialité dominicaine au cœur de Paris.
Le brunch dominical (95€/personne) représente sans doute l’expérience la plus complète, incluant un atelier où chacun peut élaborer son propre Brugal Coco Highball. J’ai particulièrement apprécié cette dimension participative qui transforme la dégustation en véritable exploration créative. Le geste précis de la Maestra Ronera Jassil Villanueva Quintana, première femme maître-rhummier de la maison et cinquième génération de la famille, semble planer sur ces ateliers où chacun devient, le temps d’un instant, artisan de sa propre expérience gustative.
Une rencontre au sommet
Ce qui fait la réussite de cette collaboration, c’est avant tout la rencontre de deux visions du luxe qui se complètent harmonieusement. D’un côté, l’héritage Delano né à Miami en 1995, incarnation d’une élégance contemporaine et décontractée. De l’autre, le savoir-faire Brugal, enraciné dans le terroir dominicain et porté par une exigence sans compromis dans la sélection des matières premières et la maîtrise de la maturation.

La philosophie du design partagée par les deux maisons trouve une expression parfaite dans ce lieu où chaque élément raconte une histoire. Cette rencontre ne se limite pas à une juxtaposition de marques, mais crée un dialogue authentique entre deux univers qui partagent le même souci du détail et le même amour des matières nobles.
Si le prix des cocktails (19€) et des mets en accords (entre 16€ et 21€) place résolument l’expérience dans le segment du luxe accessible, la qualité de l’offre et l’exclusivité du cadre justifient amplement cet investissement pour qui cherche à s’évader sans quitter Paris.
Le verdict
Le Patio Brugal réussit le pari délicat de créer une expérience immersive sans tomber dans le piège du concept marketing superficiel. L’ancrage dans deux histoires authentiques, celle de la Maison Delano et celle de Brugal, confère à ce lieu éphémère une âme et une profondeur rares. Dans un Paris qui ne manque pourtant pas d’adresses prestigieuses, cette oasis urbaine offre une parenthèse de slow living où la précision d’un service impeccable se marie à la chaleur caribéenne.
Le gastronome exigeant y trouvera une carte de cocktails signature parfaitement exécutés, tandis que l’amateur de rhum pourra approfondir sa connaissance d’une maison dont la qualité mérite d’être davantage reconnue en France. Quant au simple épicurien en quête d’un moment suspendu, il succombera sans doute au charme de ce lieu où le luxe ne s’exhibe pas mais se vit pleinement, loin du tumulte parisien.
Une adresse estivale à découvrir jusqu’au début octobre, qui incarne parfaitement cette nouvelle définition du luxe : authentique, discret et profondément ancré dans un savoir-faire