Chef de haute gastronomie qui a le premier fait du végétal le centre de sa cuisine, le visionnaire Alain Passard est né à La Guerche de Bretagne. Il remercie toujours sa grand-mère Louise Passard de lui avoir donné son premier goût de la cuisine et de la vie en cuisine et nombre de ses plats à L’Arpege lui rendent aujourd’hui hommage.
Le chef trois étoiles de L’Arpège Passard a eu un rite de passage extraordinairement illustre. Il débute dans la cuisine de Michel Kéréver du Lion d’Or de Liffré 1971-1975, l’un des rares chefs bretons « étoilés » de son époque où il apprend les fondamentaux de la cuisine classique. Cela a aiguisé son appétit pour la gastronomie et il a ensuite travaillé sous les ordres du légendaire Gaston Boyer à La Chaumière. Rejoindre Alain Senderens du restaurant parisien L’Archestrate en 1977 a été un moment décisif et Passard reconnaît que sa précision et sa légèreté de le toucher a eu un impact énorme sur lui.
Passard a ouvert son restaurant solo L’Arpège en 1986 dans l’ancien bâtiment de L’Archestrate ayant appartenu à son mentor, Senderens. Il est nommé en hommage à son père musicien, et Passard aussi est un musicien talentueux et cela informe magnifiquement sa cuisine.
L’intérieur du restaurant illustre à quel point la quête de perfection d’Alain Passard n’est pas moins intense dans la décoration de sa salle à manger qu’au cœur de sa haute cuisine végétale. La salle à manger est inspirée du style Art déco avec une frise d’écorce de poirier encapsulant son dévouement à la nature, il y a du cristal Lalique, des détails en bois de Makassari et les vitraux qui donnent sur le restaurant sont tirés d’un collage de Passard, également un artiste accompli. Le seul tableau au mur est un portrait de la grand-mère d’Alain de Louise Passard.
Pionnier, le chef Passard a retiré la viande rouge de ce menu en 2002 car il croyait avoir appris tout ce qu’il pouvait sur la cuisine avec de la viande et voulait découvrir quelque chose de plus et de nouveau sur les légumes. C’est sûrement grâce à Passard que les légumes occupent désormais une place centrale à travers le monde. Passard est le chef ultime de la ferme à la table, le maestro des légumes. Il explique : « en revenant à la saisonnalité, quelque chose d’unique et de transparent se produit. Vous êtes témoin de la singularité d’un chef ; ça marche comme une bonne pièce de théâtre ou un opéra.
Aujourd’hui, Passard continue de miser sur les légumes : rôtis, grillés ou flambés pour en extraire l’essence. L’art de la cuisson à feu vif reste primordial : « Apprenez à faire voyager délicatement votre poêle à feu vif pour garantir texture, goût, couleur, lumière et transparence à vos légumes ». Passard joue particulièrement sur les couleurs, les parfums et les qualités sucrées-salées innées des légumes cultivés dans trois jardins de trois régions différentes donnant aux légumes respectifs une signature imprégnée de terre : le sable dans la Sarthe pour les carottes, les asperges et les poireaux ; l’argile dans l’Eure pour le céleri-rave et le chou, et enfin les alluvions dans la Manche pour les herbes aromatiques. « Entre les jardiniers et moi, on discute de carottes et de betteraves comme d’autres parlent de chardonnay et de cabernet franc ! Passard a expliqué. Sa ferme produit 50 tonnes par an, 100 % entièrement naturelles et produites en bio-dynamie sur 6 hectares pour répondre aux exigences du restaurant. En 2016, il a reçu le Lifetime Achievement Award des 50 meilleurs restaurants du monde.